«Au sommet de la pyramide juridique il n’y a que ceux qui vont au tribunal et gagnent» — Sergei Kovalev, diplômé de l’Institut de droit de RUDN

«Au sommet de la pyramide juridique il n’y a que ceux qui vont au tribunal et gagnent» — Sergei Kovalev, diplômé de l’Institut de droit de RUDN

Sergey Kovalev est diplômé de l’Institut de droit, candidat en droit, professeur associé au département de droit civil et de procédure civile et de droit international privé de la RUDN, directeur associé du Collège d’avocats de la ville de Moscou «Kovalev, Tugushi & Partners». L’expérience professionnelle de Sergey comprend 28 ans de pratique active de l’arbitrage. Dans son interview, il parle de ses voisins brésiliens et cambodgiens, des sociétés par actions et des procédures de faillite, des camions de documents et de l’importance de la tradition. À la veille de l’anniversaire de la RUDN, le projet médiatique «Des milliers d’histoires — une seule université».

Comment s’est passé votre première journée à la RUDN?

À l’époque, lorsque je suis entré à la RUDN, la faculté préparatoire était obligatoire pour tous. Au premier cours, une femme professeur très extravagante est entrée dans notre petit groupe de langue et nous a dit que nous allions étudier l’espagnol. Elle portait un pantalon en cuir et ressemblait à un commandant révolutionnaire. L’enseignante a récité avec émotion le poème «La guitarra» de Garcia Lorca. Tout le monde s’est regardé et a probablement frissonné intérieurement. Cela a été un incroyable coup de langue qui nous a tous rassemblés.

J’ai du mal à me souvenir de ma première journée en qualité d’enseignant: j’ai fait une transition en douceur vers l’enseignement pendant mes études supérieures à «l’aspirantoura». Parmi mes premiers étudiants, il y avait beaucoup de gars intelligents, actifs et énergiques. Les premières années, les étudiants ont eu une perception ambiguë de moi. Ils avaient un sentiment de rivalité, et certains ne savaient pas comment se comporter avec «ce type». Je devais leur prouver que je pouvais être leur professeur et que j’avais quelque chose à leur raconter.

Parlez-nous de vos années d’études. Quel trajet faisiez-vous pour arriver à la RUDN en tant qu’étudiant? Avec qui de vos camarades de groupe avez-vous été amis, avec qui restez-vous en contact, et qui admirez-vous?

Dès les premiers jours de mes études j’ai vécu dans le foyer d’étudiants, il me suffisait de traverser la route et j’étais déjà en classe. Mes compatriotes partageant généralement une chambre avec des étrangers, j’ai vécu alors avec deux Brésiliens pendant mes études à la faculté préparatoire, dont l’un est toujours mon meilleur ami. Il a terminé avec succès son doctorat et enseigne désormais à l’université de São Paulo où il dirige le laboratoire de physique nucléaire. Un autre de mes colocataires était cambodgien; malheureusement, j’ai perdu ses contacts aujourd’hui, et notre communication a cessé. Cependant, nous étions en contact depuis longtemps, et lors de notre dernière conversation j’ai appris qu’il avait été invité à travailler comme secrétaire de l’ambassade du Cambodge aux États-Unis.

J’admire de nombreuses qualités humaines, mais je respecte avant tout le professionnalisme. Je suis en contact permanent avec mes camarades de groupe, par exemple, ce sont mes amis Valery et Larisa Konovalov, ils se sont mis en couple quand ils étaient étudiants et aujourd’hui ils ont leur propre cabinet d’avocats Konovalovs.

Un autre exemple est mon ami Alexander Savin. Il est président du Collège d’avocats et spécialiste des affaires pénales. Nous travaillons souvent avec Alexander, car les problèmes de droit civil, d’entreprise et de faillite entrent en collision avec des problèmes de droit pénal, c’est-à-dire qu’une affaire de faillite est souvent accompagnée d’affaires pénales.

De quelles professions qu’on ne peut pas trouver à la RUDN avez-vous rêvé lorsque vous étiez enfant?

Depuis l’enfance, j’ai toujours cherché à obtenir le maximum et à être le premier, alors même le métier d’astronaute ne m’intéressait pas — je voulais voler vers les étoiles, être un observateur des étoiles. Mais les gens, malheureusement, ne volent toujours pas vers les étoiles.

Et si aujourd’hui je devais choisir une profession, j’y réfléchirais, car j’ai toujours aimé et j’adore les mathématiques. Parfois je veux m’essayer dans cette science exacte, où il n’y a pas de juges avec une évaluation subjective de vos actions, quand vous pouvez prouver ou non votre justesse.

Quelles émotions éprouviez-vous les jours de soutenance de votre travail de fin d’études et de votre thèse de doctorat?

Mon directeur de recherches était Vitaly Bezbach, de mes travaux de recherche de premier cycle à ma thèse de doctorat. Il est pour moi un modèle d’intelligence, de dignité et de grand professionnalisme. J’écrivais ma thèse sur un sujet assez rare. J’y comparais le trust anglais et les structures similaires en droit allemand et français avec la gestion de trust russe, qui venait d’apparaître à l’époque. Et aujourd’hui, j’ai un gros litige judiciaire dans lequel je peux, comme les avocats anglais, agir en tant qu’expert des trusts anglais, car j’ai soutenu ma thèse de doctorat sur ce sujet.

Si vous deviez maintenant choisir à nouveau votre sujet de thèse de doctorat, lequel choisiriez-vous?

 J’aime mon sujet, mais je suggérerais une approche légèrement différente — non pas à partir du domaine d’intérêt, mais à partir de la pratique. Parce que lorsque vous traitez des questions concrètes, vous avez toujours la théorie et la pratique, vous n’avez pas besoin de recueillir du matériel et de formuler des problèmes. Si j’avais su que je n’aurais pas affaire à des trusts, je n’aurais probablement pas choisi ce sujet. Mais en termes d’approche théorique, c’était très intéressant.

Quelles étaient vos trois matières préférées lorsque vous étiez étudiant?

«Théorie du droit» et «Histoire du droit» étaient intéressants. Encore, le «Droit civil» est la reine de tout ce que je fais. Il est facile de distinguer un juriste fondamental d’un juriste superficiel: certains se contentent d’apprendre les règles, tandis que d’autres ont une théorie avec laquelle ils peuvent analyser n’importe quelle loi. C’est la carcasse sur laquelle repose tout le reste. Les lois changent souvent et si vous vous contentez d’apprendre un ensemble de normes juridiques et que ces normes changent, votre formation risque d’être réduite à néant. Et si vous avez une compréhension systémique de la loi, vous serez un bon spécialiste en droit.

L’histoire est importante pour moi grâce aux enseignants. Oleg Zhidkov, un modèle de juriste, était excellent dans ses conférences. Le professeur pratique Alexander Vishnevsky a été tout aussi formidable pour moi. En plus, j’ai eu un excellent conférencier en droit civil, Borovikov. Nous avons appris à travers des affaires concrètes: c’était mieux d’apprendre avec des illustrations et des exemples concrets.

Quelle est votre matière préférée parmi celles que vous enseignez maintenant?

J’aime le droit des sociétés par actions. Le sujet est étroit, car une société par actions n’est qu’une forme organisationnelle et juridique d’une entité commerciale. Cependant, toutes les grandes entreprises de Russie existent sous cette forme. Dans l’ère post-soviétique, c’était la première forme d’organisation à émettre des titres pour la bourse. À l’époque, c’était quelque chose qui nous est venue du monde capitaliste. J’ai travaillé à la bourse pendant plusieurs années et j’ai acquis une expérience intéressante, c’est pourquoi maintenant j’enseigne avec un grand plaisir.

Y avait-t-il des élèves qui vous surprenaient pendant vos cours?

Les étudiants me surprennent tout le temps. Par exemple, Serguey Zinkovsky, le directeur de l’Institut de droit. C’était mon premier étudiant qui ne répétait pas le contenu du manuel, mais qui donnait sa propre analyse. Serguey était en effet un étudiant exceptionnel. Nous avons travaillé ensemble pendant longtemps.

Pendant longtemps, j’ai enseigné le «droit du commerce extérieur». J’avais 2 ou 3 groupes, de 40 à 60 personnes.

Je cherchais des personnes pour rejoindre mon entreprise parmi mes étudiants. Et maintenant dans mon entreprise vous pouvez trouvez certains employés qui sont diplômés de la RUDN.

Mes partenaires dans le domaine juridique — Dmitriy Tugushi et Serguey Kislov — étaient également mes étudiants. En règle générale, à la quatrième année d’études les étudiants devenaient plus mûrs, et je pouvais toujours trouver un ou deux candidats à inviter à travailler avec moi. Je me souviens qu’à la fin de chaque cours sur le droit des sociétés il y avait un étudiant qui posait toujours une question délicate qui me faisait parfois réfléchir. Et il travaille pour moi maintenant.

Je me souviens également avoir été surpris par un groupe avec lequel j’ai travaillé l’année précédant la pandémie. En général, on peut dire qu’un groupe est bon si 5 personnes y sont actives, mais si 20 personnes sur 25 sont actives, le groupe est déjà extraordinaire. Et dans ce groupe, tous les 25 étudiants étaient impressionnants! Soit j’ai eu beaucoup de chance — j’ai eu les meilleures personnes dans mon cours, soit c’était un groupe vraiment forte, avec laquelle il était très agréable de travailler. Lorsque vous voyez l’intérêt pour votre sujet et les yeux qui brillent, vous savez que vous ne perdez pas votre temps. Aujourd’hui, l’un de ces étudiants travaille également dans mon Collège.

Quelles qualités doit avoir un étudiant pour que vous l’invitiez à travailler?

Un intérêt pour la profession, une attitude proactive face à la vie, des compétences en matière d’expertise juridique ou la capacité de les obtenir rapidement. Je suis prêt à voir et à entendre le candidat, et pour cela il doit être actif, communicatif, persévérant. L’étudiant doit briser le voile de la banalité.

Vous êtes directeur associé du Collège d’avocats de la ville de Moscou «Kovalev, Tugushi & Partners». En quoi êtes-vous spécialisé?

J’ai deux spécialités: les tribunaux et la faillite. En Russie, la faillite est placée sous le contrôle des tribunaux. Le tribunal est le moment de vérité. Les juristes peuvent agir de différentes manières, mais c’est le tribunal qui déterminera laquelle d’entre elles est la bonne. Et seuls ceux qui vont au tribunal et gagnent sont au sommet de la pyramide juridique. Je me suis rendu dans divers tribunaux russes, préparant des positions pour divers tribunaux étrangers. Le tribunal est un lieu important où un juriste peut faire ses preuves. Il doit avoir une connaissance approfondie du droit substantiel, être un excellent plaideur, un bon orateur et pas un mauvais psychologue. L’émotivité et le charisme sont importants. Aussi ne peut-il pas se passer de la logique et de la capacité à structurer. Une personne vient avec un problème qui est exposé dans un camion de documents, et vous devez en faire une position de 5 pages et livrer au juge les arguments les plus importants en 15 minutes de procédure.

La faillite en tant que ma spécialité a pris forme dans les années de crise de 2008-2009. À l’époque, d’énormes pans d’entreprises russes ont commencé à s’effondrer et ont fait l’objet d’une procédure de faillite. Nous avons été l’un des premiers sur le marché russe à traiter cette question de manière approfondie et professionnelle. Et depuis de nombreuses années, nous sommes restés le leader du marché. Depuis 2014, il y a de plus en plus de spécialistes dans ce domaine, car les entreprises font activement faillite.

Imaginez que la RUDN soit un être humain. Que lui offririez-vous pour son anniversaire?

J’aime la RUDN pour son atmosphère chaleureuse. Pour moi, c’est un lieu avec lequel je suis lié professionnellement et émotionnellement depuis longtemps. Je suis reconnaissant à Evgenia Frolova, la nouvelle responsable de la chaire de droit et de procédure civils et de droit international privé qui a essayé de maintenir la tradition.

Je donnerais à la RUDN une sorte de dispositif moderne qui l’aiderait, dans le monde moderne complexe, à trouver les bonnes solutions, à proposer des sujets intéressants et à attirer des étudiants talentueux.

Quelle «qualité» appréciez-vous le plus chez la RUDN?

La gentillesse, l’ouverture d’esprit. Il y a beaucoup d’étudiants étrangers ici, avec leurs propres règles, leur culture, leur histoire et leurs traditions. Cela vous oblige à évoluer et à regarder le monde d’une manière plus large et nouvelle. J’apprécie également le conservatisme — il fait partie de la tradition. Lorsque des éléments de quelque chose de meilleur sont préservés, c’est bon et juste. Cela crée un lien historique entre ce qui était et ce qui est maintenant. Une nation qui ne connaît pas son histoire n’a pas d’avenir. Il est donc beaucoup plus difficile pour une université qui n’a pas de lien avec son histoire de créer son avenir.

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